Le César

Sylvie Thas et Sabine Sulli

  • Talent 2024
  • Restauration
  • Centre - Val-de-Loire
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Talents BGE pour la région Centre Val-de-Loire
Reprise d'un bar-restaurant qui propose de la cuisine 100% produits frais et faits maison.

Trouver la bonne opportunité

Sabine et Sylvie avaient envie d’entreprendre ensemble. Sabine est cuisinière. Elle a été traiteur-évènementiel indépendante, puis chef dans un restaurant parisien. Sylvie, quant à elle, a été avocate, conférencière puis business developper pour un grand cabinet d’audit et de conseil. Le COVID ayant rebattu les cartes, elles ont pu réfléchir et mûrir leur projet. Sylvie nous raconte : « Nous sommes originaires du Nord, une région dans laquelle il y a beaucoup d’investissements dans le tourisme local. Nous cherchions une opportunité, d’abord du côté du programme 1001 Bistrots dans les petits villages, qui, bien que prometteur, n’a pas donné de réponse. Nous avons finalement exploré SOS Villages, un site permettant de choisir le secteur d’activité et le département. Leur site propose des offres particulières ou publiques. Après des recherches en Creuse, entre projets anciens ou trop ambitieux, nous avons élargi notre périmètre et identifié le restaurant de Brives, dans l’Indre. Une commune où le bar/restaurant était menacé de fermeture, ce qui correspondait à nos envies et répondait à un besoin local.

Un véritable coup de coeur

Après un appel à la mairie, la secrétaire et le maire, enthousiastes et impliqués, nous ont rappelées rapidement. Le village compte 236 habitants, et la gérante précédente partait à la retraite. Le département, la région et la commune ont investi ensemble 400 000 euros sur impulsion de Madame Le Maire pour moderniser, mettre aux normes et agrandir le restaurant, avec ajout d’une salle avec capacité de 50 couverts et l’aménagement d’une terrasse-jardin à l’arrière avec une capacité d’une vingtaine de couverts. Nous avons rencontré l’équipe municipale et sommes tombées amoureuses du projet et du village.

Le projet nécessitait une analyse de viabilité. Nous avons sélectionné plusieurs acteurs économiques locaux pour auditer les habitudes et opportunités. Golf, aérodrome, château reconverti en maison d’hôtes, et exploitations agricoles locales donnaient au projet un potentiel réaliste. Il fallait une dynamique collective avec la commune pour créer et développer un tourisme sans grandes prétentions, tout en offrant un menu simple et honnête, adapté aux ouvriers et aux habitants. L’idée était de proposer une cuisine qui nous fasse plaisir tout en restant accueillante, avec une atmosphère chaleureuse et ouverte.

Passer au concret

C’est à ce stade que nous avons fait connaissance avec BGE Berry-Touraine, une association très active sur le territoire. BGE nous a accompagnées tout au long du projet. Dès la candidature, il fallait rédiger un dossier solide, notre conseillère-formatrice a été d’une grande aide.

En août, la dalle de l’extension était posée. En septembre, notre projet a été retenu parmi 13 candidatures. Nous venions une semaine par mois pour suivre le chantier, travailler sur le compte d’exploitation, réaliser notre étude de marché et rencontrer BGE. Nous avons vendu notre maison à Lille pour acheter une nouvelle maison proche de Brives. Nous nous sommes mariées à la mairie de Brives et avons fait un vin d’honneur dans le restaurant en invitant beaucoup de personnes du village.

Grâce à BGE, nous avons pu remplir un dossier de subvention qui a débouché sur une aide de 8 000 euros pour les équipements de cuisine. Leur accompagnement a été précieux non seulement lors de la création de l’entreprise mais aussi après. Un parrain BGE continue de nous guider. Nous pouvons échanger sur ce qui marche et ce qui ne fonctionne pas bien. En plus des conseils de BGE, avoir un bon comptable est primordial lorsqu’on choisit un statut de juridique de SARL.

Les premiers défis

Les six premiers mois ont généré un déficit, mais nous avons réussi à le combler dès la deuxième année. La troisième année, nous avons réalisé nos premiers bénéfices. Depuis le début, Sabine est salariée (avec un petit salaire) et, pour ma part, je ne me rémunère pas encore. Au début, quand on entreprend, on ne gagne pas d’argent tout de suite. Ce qui importe, c’est d’être clair sur ses objectifs et d’avoir une vision à long terme afin de se donner les moyens de les atteindre.

Nous avons choisi de ne pas trop nous engager dans des projets annexes comme le dépôt de pain ou le point relais. Ces services demandent beaucoup d’énergie pour peu de retours. De même, nous avons ajusté nos horaires : nous ouvrons le matin dès 7h30, fermons l’après-midi pour nous reposer, et rouvrons pour le dîner. Nous avons testé d’autres formules, mais elles n’étaient pas viables. Nous avons organisé une fête d’ouverture mémorable qui a marqué les esprits et, peu à peu, les gens du village et des alentours viennent de plus en plus, attirés par le bouche-à-oreille.

Les soirées thématiques, comme une soirée moules avec entrée, dessert et un verre de vin pour 19 €, sont très populaires, mais elles montrent aussi les attentes élevées des clients. Il est essentiel de poser des limites pour ne pas être submergées. Nous avons appris à gérer les marges et à nous adapter aux goûts locaux tout en restant fidèles à nos valeurs. Par exemple, Sabine a introduit des produits, ou types de cuisson qui étaient inconnus de notre clientèle, comme un tataki, du yuzu voire de la patate douce. Tout cela est désormais apprécié. Sabine privilégie toujours des produits frais et locaux, tout en s’assurant que chaque assiette raconte une histoire.

Visions d'avenir

Aujourd’hui, nous avons consolidé notre activité et espérons pouvoir bénéficier bientôt de salaires décents pour nous deux. Nous envisageons, par la suite, de commencer à embaucher des stagiaires en cuisine, pour transmettre nos compétences. Cependant, nous savons qu’à long terme, il faudra déléguer certaines tâches, car il n’est pas réaliste de travailler 80 heures par semaine à 60 ans. Ce projet est une aventure humaine avant tout. Il ne s’agit pas seulement de faire du business, mais de créer un lieu de convivialité où les gens se rencontrent, échangent, et partagent des moments précieux.

Sabine et moi sommes fières du chemin parcouru, des défis relevés et de la confiance accordée par les habitants de Brives. Notre objectif est de continuer à faire vivre ce lieu et à le transformer en un espace où chacun peut se sentir un peu chez soi. »

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